I - Brève dictionnaire II - Des chiffres divers en fonction des définitions III - La géographie de l'immigration IV - Un rappel d'histoire
A l’heure où la migration humaine est un élément omniprésent dans les débats politiques, il semble pertinent de comprendre les définitions précises qui se cachent derrière tous ces chiffres et ces termes qui sont annoncés, très souvent sans explication, par les protagonistes de l’information.
Cependant, la migration est inhérente à l’histoire de l’humanité. Les premiers hommes ont quitté les terres du berceau de la civilisation afin de s’établir partout sur la planète.
Depuis l’accélération de la mondialisation, notamment dû à l‘amélioration des infrastructures de transports au début du 20ème siècle, les déplacements sont devenus plus rapides, plus faciles et les destinations plus lointaines.
Toutes les zones de la planète sont touchées par des flux de départ et d’arrivée de groupes humains. Les personnes se déplacent pour de multiples raisons. Aujourd’hui, on reconnait 4 grandes causes de la migration : Forcée : guerres, famines, catastrophe climatique… Economique : personne qui va exercer un travail dans un autre pays que celui de sa nationalité Regroupement familial : accompagner ou rejoindre un membre de la famille qui réside dans un autre pays Etudes : personne qui fait ses études dans un autre pays que celui de sa nationalité Les personnes qui migrent sont désignées via de nombreux termes. Dans ce nuage de mots, il est parfois difficile de comprendre ce dont on parle et de qui l’on parle. Cependant, cette compréhension est essentielle afin de saisir les enjeux véritables qui sont liés à la migration. Mais également pour appréhender les discours politiques et médiatiques avec du recul et savoir déterminer lorsque ces discours manipulent les chiffres et les mots.
Migrant : Terme générique non défini dans le droit international qui, reflétant l’usage commun, désigne toute personne qui quitte son lieu de résidence habituelle pour s’établir à titre temporaire ou permanent soit dans une autre région à l’intérieur d’un même pays, soit dans un autre pays. Emigré : personne qui se rend dans un pays autre que celui de sa nationalité ou de sa résidence habituelle, de sorte que le pays de destination devient effectivement son nouveau pays de résidence habituelle.
Immigré : Le temps d’un passage de frontière, l’émigré devient un immigré. Ce terme désigne une personne née dans un autre pays que celui où elle réside, qui a donc franchi une frontière (ou plusieurs) depuis sa naissance. Elle peut avoir la nationalité de son pays de naissance ou avoir une autre nationalité, notamment celle du pays dans lequel elle réside. Exilé : Situation de quelqu'un qui est expulsé ou obligé de vivre hors de sa patrie.
Réfugié (Convention de 1951) : Personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner.
Demandeur d’asile : Personne sollicitant la protection internationale. Dans les pays appliquant des procédures d’examen individualisées, le demandeur d’asile est une personne dont la demande d’asile n’a pas encore fait l’objet d’une décision définitive de la part du pays d’accueil potentiel. Tout demandeur d’asile n’est pas nécessairement reconnu comme réfugié à l’issue du processus, mais tout réfugié a, dans un premier temps, été demandeur d’asile. Sans papier : Personne qui réside dans un pays dont il n’a pas la nationalité de manière irrégulière administrativement. Elle peut être en procédure de régularisation.
Le point commun de toutes ces définitions est qu’elles désignent des personnes qui ont effectué un changement de résidence principale. Cependant, en fonction des termes choisis les chiffres qui correspondent aux personnes désignées sont très différents.
Les flux migratoires sont très différents en fonction des espaces géographiques. Ces notions sont également importantes parce qu'elles véhiculent parfois de fausses idées.
Il est aussi important de prendre en compte que les migrations à l’intérieur d’un même continent sont plus nombreuses que celles qui vont d’un continent à un autre. Mais également que les migrations se font plus de pays dits « du Sud » vers d’autre pays dits « du Sud » que des « Suds » vers les « Nords ».[i] Migrer est un processus très couteux et les personnes les plus pauvres immigrent dans les pays voisins de leur pays de départ. Ainsi 80% des migrations subsahariennes sont internes. En Europe, c’est 1/3 des migrants qui vient d’autres pays européens.
Il est important de prendre en compte la part de personnes immigrées dans une population totale, notamment afin de mieux appréhender qui sont les pays qui accueillent le plus.
La Lettonie est ainsi le pays européen accueillant le plus de ressortissants de pays non européens : 13,8% (majoritairement Russe).
La proportion de population immigrée en Turquie est ainsi de 4%.
[i] On distinguait habituellement les pays du Sud comme étant ceux en développement et ceux du Nord comme ceux développés. Ces notions sont aujourd’hui fortement remises en question notamment du fait de la très grande hétérogénéité des espaces sur le plan économique, commercial, social, etc. mais également parce que la notion de développement est aussi questionnée.
La compréhension des raisons de la migration est évidemment nécessaire et intrinsèquement liée aux évènements et mutations historiques. Il y a ainsi une pluralité de motifs qui ont façonné les migrations depuis les débuts de l’humanité. Néanmoins, il est possible de mettre en évidence quelques points afin de mieux comprendre les problématiques actuelles liées à la migration.
Au début du XXème siècle, c'est depuis les pays d’Europe qu’on émigre le plus. L’accélération de la mondialisation avec l’amélioration des transports rend plus facile le déplacement des personnes. On assiste alors à une véritable augmentation du nombre de migrants. En 1910, la part des migrants représente 5,4% de la population mondiale. Cette part a ensuite diminué puis s’est stabilisée. Aujourd’hui, cette part représente 3,5% de la population mondiale. Selon Catherine Withol de Wenden, chercheuse au CNRS, la France compte aujourd’hui une part moins importante de migrants dans sa population que dans les années 1930.
Les multiples conflits qui ont agité la scène internationale durant le XXème siècle ont eu un impact très important sur les flux migratoires du fait qu’ils ont engendré de très nombreux déplacements de population. En 1945, c'est 30 millions d’européens qui ont été déplacés. Mais cela a eu aussi un impact sur les politiques liées à la migration. En effet, la Convention de Genève qui établit le statut de réfugié dans le droit international découle directement des conséquences de la Guerre Froide qui opposait alors les Etats-Unis à l’URSS pour le statut de plus grande puissance internationale.
Il est ainsi important de notifier que le droit d’asile est inscrit dans le droit à trois différents niveaux : Le droit international avec la Convention de Genève de 1951 ratifié par 135 pays. Le droit européen avec la Charte des droits fondamentaux de l’Europe, article 18. Le droit français : il est inscrit dans le préambule de la constitution de 1958 que « Tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d'asile sur le territoire de la République ». De ce fait, toute personne arrivant sur le territoire doit avoir le droit de déposer une demande d'asile. Il est illégal de renvoyer une personne sans avoir eu la décision des instances décisionnelles de l’OFPRA sur sa possibilité d’acquérir le statut de réfugié ou non.
Il est ainsi important de notifier que le droit d’asile est inscrit dans le droit à trois différents niveaux : Le droit international avec la Convention de Genève de 1951 ratifié par 135 pays. Le droit européen avec la Charte des droits fondamentaux de l’Europe, article 18. Le droit français : il est inscrit dans le préambule de la constitution de 1958 que « Tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d'asile sur le territoire de la République ».
Mais dans les années 1950-1970, c’est l’essor économique des Trente Glorieuses qui ont le plus grand impact sur l’immigration en France. En effet, à la suite de la Seconde Guerre Mondiale, la France (comme les autres pays d’Europe de l’Ouest) connait un essor industriel très important. Cependant, le pays manque de main d’œuvre et fait donc appel aux populations des pays voisins pour venir travailler à moindre coût sur le territoire national. En 1960, on dénombre ainsi 557 000 italiens (ce qui représentait alors 1% de la population française). Aujourd’hui encore ces évènements ont un fort impact sur les zones d’arrivées des immigrés en France.
Droit d’asile et politique migratoire, site de l'Etat français https://www.vie-publique.fr/eclairage/20174-droit-dasile-et-politique-migratoire Retraites : faut-il craindre un manque d'actifs pour financer le système ?, LCI https://www.tf1info.fr/politique/reforme-des-retraites-2019-faut-il-craindre-un-nombre-d-actifs-trop-faible-pour-financer-le-systeme-delevoye-2115795.html TERMES CLÉS DE LA MIGRATION, OIM https://www.iom.int/fr/termes-cles-de-la-migration Nombre de déplacés record depuis la Seconde Guerre mondiale, Le Figaro https://www.lefigaro.fr/international/2014/06/20/01003-20140620ARTFIG00421-nombre-de-deplaces-record-depuis-la-seconde-guerre-mondiale.php EU Charter of Fundamental Rights, european agency for fundamental rights https://fra.europa.eu/fr/eu-charter/article/18-droit-dasile
Comprendre les termes liés aux migrations, OXFAM France https://www.oxfamfrance.org/migrations/migrants-refugies-definitions-et-enjeux/ Immigration et asile : l'OCDE met en évidence la situation singulière de la France, Banque des territoires https://www.banquedesterritoires.fr/immigration-et-asile-locde-met-en-evidence-la-situation-singuliere-de-la-france MIGRANTS : « NON, LA FRANCE N’EST PAS SUBMERGÉE », Secours Catholique https://www.secours-catholique.org/actualites/migrants-non-la-france-nest-pas-submergee Migrant, émigré, exilé : quelles différences ? https://www.nationalgeographic.fr/histoire/2019/08/migrant-emigre-exile-quelles-differences Les mots de l'immigration, Stéphane Dufoix, Belin, 2009